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L'art en tant que médecine lors d’une pandémie: entrevue avec l'artiste crie Natasia Mukash

Summary

Le CCSSSBJ a approché Natasia Mukash, une artiste basée à Whapmagoostui, afin de lui demander de créer un ensemble d'oeuvres qui transmettrait des messages de prévention de santé, en utilisant un style ancré dans l'art cri

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Le but du projet était de présenter la culture crie comme résiliente face à cette nouvelle menace et d’illustrer comment le mode de vie des Cris et leur connaissance du territoire sont des sources de santé et de force. Dans l'entrevue ci-dessous, Natasia raconte comment elle a géré ses propres sentiments face a la pandémie, elle y partage aussi son désir de contribuer à une campagne de santé publique mettant l’art autochtone en premier plan.

Natasia, qu'avez-vous ressenti lorsque le COVID-19 a commencé à se propager partout au Québec, entrainant des mesures de confinement?

Quand j'ai entendu parler de la pandémie pour la première fois, je me suis tout de suite inquiétée pour ma famille. J'ai de la famille et des amis qui vivent dans le sud, principalement à Montréal et dans les environs. J'ai demandé à ma fille qui travaillait à Montréal de rentrer à la maison. Je savais qu'elle serait plus en sécurité ici à Whapmagoostui. Elle a dû quitter Montréal presque immédiatement en raison du confinement. C'était stressant. Mais j'avais l'impression que nous faisions la bonne chose.

À Whapmagoostui, nous avons suivi tous les protocoles de santé. Nous avions un couvre-feu, l'école a été annulée et nous avons tous commencé à ressentir la pression de devoir vivre encore plus dans l'isolement. Les lieux publics comme les épiceries étaient limités à une personne par ménage et c'est difficile lorsque vous vivez avec une famille de huit personnes ou plus dans une maison, ce qui est une réalité pour nous en tant que familles autochtones.

À un moment donné, nous avons décidé de passer nos journées au camp, sur nos terres, pour nous évader. Mais, même-là, nous ne nous sentions pas en sécurité. Nous avons accueilli de nombreux étrangers dans notre communauté. Mes enfants étaient là et nous avons commencé à nous sentir en danger. Comme tout le monde, nous sentions que rien n’etait sécuritaire.

Même si certaines des restrictions ont commencé à etre assouplies, le couvre-feu était toujours en place. Imaginez: devoir rester chez vous même lorsque le soleil ne se couche pas. Pour nous dans le Nord, parfois tout ce que nous avons, c'est le coucher du soleil pour nous apaiser. Les habitants se rassemblent le long de la baie pour regarder le coucher du soleil presque tous les jours. Même cela a nous été enlevé. Les choses devenaient difficiles et notre santé mentale était mise à l'épreuve.

Je crois qu’il est important pour nous en tant qu’artistes Eeyou et Enou de nous impliquer dans la création d’un art qui sera marquant pour les générations futures. La pandémie de Covid-19 est un événement historique. L'art, la photographie et la narration d'histoires sont essentiels pour illustrer comment nous avons fait face à cette menace. Ce qui est encore plus crucial pour moi, c'est de créer un contenu pertinent et compréhensible pour notre peuple et ceci à travers notre regard et notre expérience en tant que Cris.

Quelle a été votre réaction lorsque le CCSSSBJ vous a contacté au sujet d'une collaboration à une campagne de prévention contre le COVID-19?

Au début, je n’étais pas sûr d’être la bonne personne pour créer cet art. J'avais le sentiment que le fait de vivre à Whapmagoostui, une communauté isolée, ne me donnait pas une très bonne compréhension de ce que c'était que de vivre là où il y avait des cas de COVID-19. Je me demandais comment j’allais pouvoir illustrer cela? Les gens autour de moi m'ont rassuré, me rappelant que nous vivions et affrontions tous la pandémie ensemble. J'ai commencé à me sentir plus à l'aise et prête à faire le travail. J'ai senti qu'il était temps de créer un art qui serait rassurant pour tout le monde.

Alors que nous sommes toujours en pleine pandémie, que voulez-vous transmettre à votre public avec ce projet?

Je crois qu’il est important pour nous en tant qu’artistes Eeyou et Enou de nous impliquer dans la création d’un art qui sera marquant pour les générations futures. La pandémie de Covid-19 est un événement historique. L'art, la photographie et la narration d'histoires sont essentiels pour illustrer comment nous avons fait face à cette menace. Ce qui est encore plus crucial pour moi, c'est de créer un contenu pertinent et compréhensible pour notre peuple et ceci à travers notre regard et notre expérience en tant que Cris.

Qu'espérez-vous que cette campagne de sensibilisation au COVID-19 réalise à Eeyou Istchee?

Les images que j'ai créées illustrent ce que nous vivons au quotidien depuis le début de la pandémie. Ces pratiques de prévention sont devenues la norme pour nous tous. Ma fille de 5 ans nous dit toujours de «se laver les mains» et c'est elle qui nous rassure que tout ira bien. Nous ne réalisons pas à quel point nos enfants et notre peuple sont résilients jusqu'à ce qu’un événement comme celui-ci arrive. Ces images sont accessibles à tout le monde, avec ou sans mots.

D'où vous êtes-vous inspiré pour créer ces quatre belles images?

J'ai dû réfléchir à ce projet pendant un moment avant de pouvoir les créer. Que signifiaient-elles pour moi? Comment m'assurer que ces oeuvres parlent sans mots? J'ai pensé à ma plus jeune enfant et à la façon dont elle comprenait ce que nous devions faire pour être à l'abri du COVID-19. Qu'est-ce que cela signifiait pour nous en tant qu'Eeyou/Enou? Ce que nous côtoyons dans notre vie quotidienne : la terre, la médecine traditionnelle, les gens et nos proches sont les éléments les plus importants pour notre peuple. J'ai gardé cela à l'esprit lors de la création de ces images.

Que voulez-vous que le public retienne de ces images?

Je ne voulais pas être trop clinique dans le type d’œuvre que j’ai créé. Ce que vous voyez: c’est le point de vue d'une mère, d'une femme, d'une fille, d'une sœur, d'une tante; de quelqu'un qui vit la pandémie au quotidien. Je voulais pouvoir atteindre les gens, les enfants, les aînés. Je voulais montrer à quel point il est important de faire ces gestes de prévention dans notre vie quotidienne, c'est notre normale maintenant et c’est correct . Nous apprenons à nous adapter et ainsi à assurer la sécurité de nos familles. Je voulais montrer, avec ces oeuvres, que c'est la manière de le faire.

Artwork: Man and woman wearing masks, standing next to each other

"J'ai pensé à ma plus jeune enfant et à la façon dont elle comprenait ce que nous devions faire pour être à l'abri du COVID-19."

"Ce que vous voyez: c’est le point de vue d'une mère, d'une femme, d'une fille, d'une sœur, d'une tante; de quelqu'un qui vit la pandémie au quotidien."

Artwork: Mother puts mask on child
Artwork: Washing hands

"Les images que j'ai créées illustrent ce que nous vivons au quotidien depuis le début de la pandémie. Ces pratiques de prévention sont devenues la norme pour nous tous. Ma fille de 5 ans nous dit toujours de «se laver les mains» et c'est elle qui nous rassure que tout ira bien."

"Qu'est-ce que cela signifiait pour nous en tant qu'Eeyou/Enou? Ce que nous côtoyons dans notre vie quotidienne : la terre, la médecine traditionnelle, les gens et nos proches sont les éléments les plus importants pour notre peuple. J'ai gardé cela à l'esprit lors de la création de ces images."

Artwork: Man and woman walking on the land

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